Souffler… ou s’essouffler !

La pratique du bouche-à-bouche n’a rien de glamour. En effet si tout le monde ou presque accepte de « manipuler » une victime pour pratiquer un massage cardiaque ou de coller les électrodes d’un défibrillateur, ceux et celles qui acceptent de pratiquer le bouche-à-bouche sur une victime inconsciente sont beaucoup moins nombreux.
Et cela se comprend…

De plus pratiquer une bonne insufflation dans les poumons d’une victime, ce qui signifie remplir les voies respiratoires de la victime avec l’air contenu dans ses propres poumons, demande une maîtrise de certaines techniques lesquelles, si elles sont mal connues, risquent de rendre la manœuvre plus délétère que bénéfique.

A tel point que la plupart des Sociétés Savantes de Cardiologie et de Réanimation de très nombreux pays, recommandent-elles de ne pratiquer la réanimation AVEC insufflations que si un sauveteur suffisamment expérimenté est apte à pratiquer cette manœuvre de façon efficace. Elles seront alors pratiquées au rythme de 2 insufflations toutes les 30 compressions thoraciques.

Les insufflations restent néanmoins indispensables en cas de noyades ou d’électrocution et sur les enfants.

Dans tous les autres cas seules les compressions thoraciques du « massage cardiaque » doivent être pratiquées, sur un rythme de 100 compressions par minute et ce sans attendre de disposer d’un appareil de défibrillation cardiaque automatisé externe (DAE). Bien entendu ces compressions doivent être interrompues le moins longtemps et le moins souvent possible.

En fait les compressions ne devront cesser que quelques secondes, période durant laquelle le DAE va analyser la fibrillation cardiaque puis délivrer son choc électrique.

Très brièvement, voici comment expliquer que les insufflations ne sont pas une priorité en cas d’arrêt cardiaque soudain:

Le sang-vous le savez sans doute – contient de l’oxygène qui est indispensable au fonctionnement des organes, et le transporte dans l’ensemble du corps humain grâce à l’action de la pompe cardiaque.

Ce précieux gaz – l’oxygène – est donc « prélevé » par chaque organe, en fonction de ses besoins du moment, lorsqu’il « passe » devant lui.

Mais le sang reçoit à chaque inspiration d’air, une quantité d’oxygène très supérieure aux besoins habituels du corps dans un fonctionnement « normal ». Ceci explique par exemple (et sous réserve bien entendu de bénéficier d’un encadrement médical adapté) que les champions d’apnée puissent rester immobiles dans une piscine pendant 11 (onze !) minutes sans respirer, voire 24 minutes pour le record actuel s’ils respirent de l’oxygène pur pendant quelques minutes avant de s’immerger. Et que dire des phoques, dauphins ou baleines, apnéistes confirmés…et sans encadrement médical eux !!!

Si j’ai surligné le mot Immobile, c’est qu’il est fondamental : C’est bien parce que les besoins en oxygène de ces champions est minime pendant leurs tentatives qu’ils parviennent à de tels performances. Pour simplifier, je dirai que dans ce cas, seuls le cœur et le cerveau consomment alors de l’oxygène sachant que le cerveau, qui est un gros consommateur, est mis en état « second » par des techniques particulières d’auto hypnose et de méditation.

Et c’est là que je vous fais remarquer que la situation d’une victime d’un arrêt cardiaque est assez similaire. Les muscles ne bougent plus, le cerveau fonctionne surement mais « au ralenti » et le cœur, hélas, ne bat plus, ou si peu !! Les besoins en oxygène sont donc très faibles, et la réserve que contient le sang de la victime, pour peu que l’on puisse le faire circuler, pourra suffire pour les premières minutes au moins !!! D’où l’importance d’un massage très précoce et surtout continu jusqu’à la reprise de l’activité cardiaque. Ce geste essentiel permettra de maintenir un « flot » sanguin continu qui diffusera l’oxygène encore présent dans le sang de la victime et ce encore pendant plusieurs minutes après l’arrêt cardiaque;

Pour résumer, pas de perte de temps : Ne gaspillons pas notre énergie à faire de mauvaises insufflations et concentrons-nous sur la mise en place de la chaîne de survie qui consiste sans délai à alerter les secours, pratiquer un massage cardiaque efficace et continu, utiliser un défibrillateur pour faire « repartir» le cœur sous l’effet d’un ou de plusieurs chocs électriques.

Nous reparlerons prochainement de la chaîne des secours.